Reporter l’équilibre budgétaire pour ne pas nuire à l’économie : un faux argument anti-austérité
18 juin 2015
L’argument anti-austérité selon lequel il faudrait reporter l’équilibre budgétaire de quelques années pour soutenir davantage l’économie à court terme ne tient pas la route dans le contexte socioéconomique actuel du Québec. C’est ce que révèle le nouveau rapport de l’Institut du Québec (IdQ) intitulé Croissance économique et austérité : l’heure juste sur la situation du Québec.
D’après les analyses effectuées, l’effort de compression budgétaire actuel n’est pas trop hâtif. « L’économie du Québec est en mesure de le supporter, car elle croît actuellement à un rythme qui avoisine son rythme de croissance à long terme », soutient Mia Homsy, directrice de l’IdQ. Avec une croissance du PIB qui devrait s’établir, de 2015 à 2017, aux alentours de 2 % – soit la moyenne des 35 dernières années –, le Québec est bien engagé sur le chemin de la reprise économique.
Ce contexte ne justifie pas que le gouvernement augmente ses dépenses pour stimuler l’économie. « C’est un faux argument que de plaider un report de l’équilibre budgétaire pour ne pas nuire à la croissance économique », commente Robert Gagné, directeur de la recherche à l’IdQ. De fait, aucun des indicateurs socioéconomiques analysés par l’IdQ dans une perspective historique et comparative ne justifie un report de l’échéance de l’atteinte de l’équilibre budgétaire pour soutenir davantage l’économie à court terme.
Un taux de chômage sous sa tendance historique, un taux d’emploi plus élevé que la moyenne des dernières décennies, des inégalités sociales stables, un poids des dépenses publiques dans l’économie en hausse et un endettement gouvernemental à un nouveau sommet historique ne justifient pas une intervention additionnelle de l’État à court terme au Québec, sous peine de compromettre ses leviers d’action et sa marge de manœuvre future advenant une autre récession.
Selon les prévisions du Conference Board du Canada, le Québec atteindra son PIB potentiel en 2017 – c’est-à-dire son niveau de production viable à long terme –, grâce à une plus forte croissance économique prévue au cours des prochaines années. Dans ce contexte, toute stimulation gouvernementale additionnelle pourrait accroître l’endettement public sans avoir un impact durable sur la performance économique de la province.
« Dans le contexte actuel, la priorité est plutôt de mettre en place les conditions de croissance à long terme afin d’atténuer les effets du vieillissement de la population sur le marché du travail, souligne Mia Homsy. Cela commence par une main-d’œuvre qualifiée et bien formée qui saura répondre aux besoins d’une société moderne et d’une économie de plus en plus basée sur les technologies avancées. »
Ce rapport de l’IdQ se penche également sur l’impact de l’intervention gouvernementale sur la croissance économique durant un cycle économique complet, soit entre 2003 et 2016, afin d’évaluer si la politique budgétaire en a été une d’austérité ou de stimulation.
« Après avoir stimulé fortement l’économie entre 2007 et 2009, le gouvernement du Québec a amorcé en 2010 une période de restrictions budgétaires qui se poursuivra jusqu’en 2016, explique Robert Gagné. Selon les calculs de l’IdQ, basés sur la méthodologie du FMI, les constats sont clairs : entre 2003 et 2016, il n’est absolument pas question d’austérité au Québec, puisque le gouvernement aura plutôt contribué à stimuler directement l’économie à hauteur de 3,5 G$. » Lorsqu’on tient compte des effets indirects et induits qui découlent de ces investissements publics, l’impact économique total de l’intervention gouvernementale sur cette période aura été encore plus positif pour l’économie.
Il est important de mentionner que ce rapport ne porte pas sur la manière dont les compressions sont effectuées ni sur l’impact qu’elles pourraient avoir sur le niveau et la qualité des services offerts à la population. Il se concentre sur la capacité de l’économie à absorber les compressions actuelles.